Lauréats 2025

Giannini_carre

Margherita GIANNINI, MD PhD

Physiologie et Explorations fonctionnelles musculaires, CHU Strasbourg
Centre de Référence des Maladies Autoimmunes Rares, Strasbourg
UR3072 «mitochondrie, stress oxydant et plasticité musculaire», CRBS

Le projet, retenu dans le cadre de ce Fonds de Dotation CSL Behring pour la recherche, porte sur Les dysfonctionnements métaboliques induits par les autoanticorps anti-HMGCR : un marqueur pronostique et une cible thérapeutique pour la myopathie nécrosante auto-immune.

Résumé

Les anticorps anti-HMGCR sont un biomarqueur de la myopathie nécrosante autoimmune (MNAI), un sous-type de myopathie inflammatoire (MI) caractérisé par une faiblesse musculaire et une nécrose des myofibres. La physiopathologie de cette maladie étant encore partiellement comprise, les traitements actuels restent empiriques et ne sont que partiellement efficaces. De plus, il n’existe à ce jour aucun biomarqueur pronostique pour cette pathologie, dont la sévérité et la réponse au traitement sont hétérogènes.

Récemment, il a été démontré que les anticorps anti-HMGCR sont internalisés dans les myofibres des patients atteints de MNAI. De plus, nous avons montré que ces anticorps inhibent l’activité de l’enzyme HMGCR, entraînant une accumulation de gouttelettes lipidiques dans les myofibres ainsi que leur nécrose. Toutefois, la mesure directe de l’activité de la HMGCR dans le muscle des patients atteints de MNAI, son impact sur les métabolites en amont et en aval, la corrélation entre l’activité musculaire de HMGCR et l’évolution clinique, ainsi que le potentiel thérapeutique du ciblage de la voie du cholestérol dans la MNAI n’ont pas encore été explorés.

Nous formulons l’hypothèse que, dans les myofibres des patients atteints de MNAI, l’inhibition de la voie du cholestérol par les anticorps anti-HMGCR constitue un mécanisme central de la physiopathologie de la maladie, un biomarqueur pronostique potentiel, ainsi qu’une cible thérapeutique. Pour tester cette hypothèse, cette étude vise à évaluer l’activité de l’enzyme HMGCR dans le muscle des patients atteints de MNAI, à analyser les conséquences de son inhibition sur les métabolites en amont et en aval, et à déterminer si le degré de blocage de HMGCR dans le muscle est corrélé à l’évolution clinique des patients.

Nous avons prospectivement collecté les muscles deltoïdes de 76 patients atteints de MI, dont 18 atteints de MNAI à anticorps anti-HMGCR et 58 atteints d’autres formes de MI, ainsi que de 10 patients témoins souffrant de myalgies sans myopathie. Aucun de ces patients ne recevait d’immunomodulateurs ni de statines au moment de la biopsie musculaire. Des dosages ciblés des métabolites en amont et en aval de l’enzyme HMGCR (HMG-CoA / mévalonate), ainsi qu’une analyse métabolomique non ciblée, seront réalisés sur ces échantillons musculaires. Les résultats seront corrélés à 90 paramètres cliniques standardisés, évalués au moment de l’inclusion et tout au long du suivi.

Cette étude répondra à des besoins médicaux non satisfaits majeurs dans le domaine de la MNAI associée aux anticorps anti-HMGCR. Elle permettra de mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques de la maladie, d’identifier des biomarqueurs pronostiques, et d’ouvrir la voie à des stratégies thérapeutiques innovantes ciblant spécifiquement ces mécanismes.

Jouber_carre

Bastien JOUBERT, PUPH

Hôpital Neurologique Pierre wertheimer, 69500 BRON

Bourse en Immunologie

Le projet, retenu dans le cadre de ce Fonds de Dotation CSL Behring pour la recherche, porte sur les auto-anticorps dans l’encéphalite anti-NMDAR : aux sources de la pathogénicité.

Résumé

Les encéphalites avec anticorps anti-NMDA récepteur (E-NMDAR) sont les encéphalites autoimmunes les plus fréquentes. Les anticorps anti-NMDAR retrouvés dans le liquide céphalorachidien (LCR) des patients sont directement pathogènes et provoquent l’internalisation du récepteur NMDA, à l’origine d’une perturbation réversible de la transmission synaptique. Cette perturbation aboutit à des troubles neurologiques graves ; il est donc essentiel de comprendre les mécanismes à l’origine de la production d’anticorps anti-NMDAR pathogènes.

L’objectif de ce travail est de caractériser, dans les E-NMDAR, les répertoires BCR (B cell receptor) dans le sang périphérique et le LCR des patients, et d’étudier les corrélations entre le degré de maturation des séquences BCR (nombre de mutations somatiques, isotype) et capacité des anticorps à internaliser le NMDAR. Nous nous intéresserons également aux cytokines et voies de signalisation intracellulaires impliquées dans la production des anticorps anti-NMDAR.

Les données de scRNA seq obtenues sur les cellules mononucléées du sang périphérique (peripheral blood mononuclear cells, PBMC) et du LCR de 5 patientes avec une E-NMDAR, déjà prélevés et séquencés, seront analysés et comparés à des contrôles en suivant un pipeline préétabli. De cette façon, nous caractériserons les différentes populations cellulaires, les répertoires BCR, et les cytokines et voies de signalisation impliquées. Des anticorps monoclonaux anti-NMDAR seront ensuite générés à partir des principaux clones BCR identifiés. La capacité à internaliser le NMDAR de ces auto-anticorps sera mesuré sur des neurones hippocampiques primaires de rat en culture, et le nombre de mutations somatiques, ainsi que l’isotype (IgG, IgM, Fab) sera corrélé avec la capacité d’internalisation. En parallèle, les lymphocytes B naïfs et mémoires issus des PBMC de 3 autres patients seront triés et mis en culture pour comparer le profil des anticorps anti-MDAR sécrétés par les LB naïfs versus mémoire (spécificité anti-NMDAR, dilutions limites, effet sur l’internalisation des NMDAR in vitro) chez les patients et des contrôles sains. Enfin, les profils cytokiniques dans les LCR des patients seront étudiés par Proximity Extension Assay, une technique de protéomique multiplex de dernière génération.

Au total, ce projet permettra de clarifier les origines de la pathogénicité des anticorps anti-NMDAR. Au-delà des seules considérations physiopathologiques, ces résultats permettront de guider les recherches vers des traitements plus ciblés et plus efficaces. Il apportera des preuves de concept sur l’étude des anticorps pathogènes qui pourra s’appliquer à de nombreuses autres maladies à médiation anticorps du système nerveux central (encéphalite anO-LGI1, maladie du spectre NMO, spectre des anti-MOG).

Le candidat, pour le présent projet, s’appuiera sur une équipe multidisciplinaire (neurobiologie, immunologie bio-informatique) qu’il a contribué à constituer et dont il a dirigé plusieurs travaux. Le candidat sera impliqué dans la coordination de l’ensemble des étapes du projet et supervisera toutes les expérimentations et étapes d’analyses qui seront réalisés par les différents chercheurs impliqués.

Dieudonne_carre

Yannick DIEUDONNE (MD, PhD)

Immunologie Clinique et Médecine Interne Nouvel Hôpital Civil, 67000 Strasbourg

Le projet, retenu dans le cadre de ce Fonds de Dotation CSL Behring pour la recherche, porte sur les lymphocytes B Pathogènes dans le syndrome des antiphospholipides.

Résumé

Le syndrome des antiphospholipides (SAPL) est une maladie auto-immune médiée par des auto-anticorps pro-coagulants, dits antiphospholipides (aPL). Les manifestations cliniques, souvent sévères, incluent des thromboses veineuses ou artérielles récurrentes et des complications obstétricales. Il touche 1/2000 personnes et il n’existe pas de traitement spécifique à l’exception d’une anticoagulation prolongée. Le SAPL « primaire » survient en l’absence d’autre autre maladie auto-immune systémique. Il est bien établi que les lymphocytes B, notamment via la production d’aPL, jouent un rôle central dans la pathogenèse du SAPL.

Nous avons récemment décrit les perturbations lymphocytaires B inhérentes au SAPL primaire, mais les caractéristiques des lymphocytes B (LB) produisant spécifiquement les apL restent peu connues. Compte tenu de la nature hétérogène des aPL, une analyse ciblée des LB produisant des aPL (LB apL) dont la pathogénicité est démontrée est indispensable. Les LB producteurs d’anticorps anti-domaine I  de la β2GPI apparaissent comme des candidats idéaux, car ces auto-anticorps sont associés à la pathogénicité, et leur présence est fortement associée aux manifestations cliniques. À l’aide d’un antigène biotinylé et de de tétramères streptavidine, nous avons développé une méthode de cyrtométrie en flux permettant de détecter et trier ces LB spécifiques du domaine I de la β2GPI, producteurs d’aPL pathogènes.

Cette méthode, couplée à une technique de culture en cellule unique après tri, permettra d’étudier ces cellules en termes de phénotype, transcriptome, répertoire BCR et pathogénicité à l’échelle unicellulaire chez des patients atteints de SAPL.

Nos résultats préliminaires, effectuée chez deux sujets sains et un patient, ont permis de valider cette approche. Elle nous permettra de caractériser de façon approfondie des LB auto réactifs dans le SAPL et d’identifier des marqueurs/signatures spécifiques, avec pour objectif de révéler des cibles thérapeutiques d’intérêt.

Ferreira_carre

Christophe FERREIRA DE MATOS, MD, PhD

Équipe 7, UMR 1297, I2MC – CHU de Toulouse

Le projet, retenu dans le cadre de ce Fonds de Dotation CSL Behring pour la recherche, porte sur le Thrombo-inflammation et drépanocytose : conséquences sur l’axe mégararyocyte/plaquette et impacts de la transfusion.

Résumé

La drépanocytose est la maladie génétique la plus fréquente de France. Il s’agit d’une hémoglobinopathie au phénotype complexe, associant complications aiguës et chroniques grevées d’une morbi-mortalité majeure. La crise vaso-occlusive (CVO), manifestation clinique la plus fréquente, est caractérisée par des douleurs osseuses intenses requérant fréquemment une hospitalisation pour antalgie par opioïdes intra-veineux. L’hémolyse, l’inflammation chronique et l’endothéliopathie constituent le trépied de la physiopathologie de la drépanocytose. Toutefois, la thrombo-inflammation, définie comme l’interaction entre immunité innée et hémostase, émerge en tant qu’acteur important de la maladie. Le rôle des plaquettes, à l’interface de ces deux entités reste non élucidé. Notre équipe a rapporté dans une étude pilote longitudinale sur 19 patients drépanocytaires pendant une CVO, à J7 et 2 mois de la crise que :

1/ les plaquettes des patients drépanocytaires présentent une activation constante, mise en évidence par des marqueurs solubles et de surface pro-thrombotiques et pro-inflammatoires ;

2/ les plaquettes présentent une anergie partielle à la stimulation ex vivo par des agonistes ;

3/ le thrombus formé ex vivo en microfluidique présente une instabilité à un niveau de shear stress élevé ;

4/ La CVO est caractérisée par une augmentation transitoire de l’activité de la caspase-1 dans les plaquettes, impliquée dans la voie de maturation de l’IL-1β, en corrélation avec l’activation de l’inflammasome NLRP3, démontrant le phénotype pro-inflammatoire ;

5/ les patients drépanocytaires présentent une augmentation significative des pro et pré-plaquettes circulantes dans le sang périphérique.

Ces données démontrent le rôle plaquettaire dans le mécanisme thrombo-inflammatoire satellite de la drépanocytose et suggèrent une mégacaryopoïèse modifiée.

À la lumière de ces résultats, l’objectif de ce projet est double :

– Rechercher la présence de mégacaryocytes circulants, les quantifier et analyser leur transcriptome à chaque stade de la maladie.

– Étudier l’impact des thérapeutiques actuelles, notamment le programme transfusionnel sur la thrombo-inflammation.

Ces travaux inédits et novateurs pourraient ouvrir de nouvelles perspectives thérapeutiques.

CMasset_carre

Docteur Christophe MASSET

Center for Research in Transplantation and Translational Immunology – 44000 Nantes

Le projet, retenu dans le cadre de ce Fonds de Dotation CSL Behring pour la recherche, porte sur la caractérisation et l’impact d’un phénotype sénescent chez les donneurs et les receveurs d’une greffe rénale.

Résumé

En transplantation rénale, plus de 35% des greffes proviennent de donneurs à risque d’échec – dits « marginaux » – dont le principal facteur de risque est l’âge du donneur. La sénescence cellulaire, processus du vieillissement biologique, génère un état inflammatoire chronique via notamment la sécrétion de cytokines. La senescence du système immunitaire (Immunosenescence), a été montrée comme impliquée directement dans le vieillissement des organes. Récemment, l’équipe de la Mayo Clinic a mis au point une signature de gènes (SenMayo) permettant d’évaluer et quantifier la senescence tissulaire et immunitaire.

D’une part, nous avons montré sur des biopsies rénales post-transplantation que la signature SenMayo était validée dans un contexte allo-immun, et était significativement associée à l’inflammation du greffon mais aussi à l’âge du donneur, reflétant ainsi le phénomène d’Inflamm-aging. Surtout, l’expression de la signature SenMayo était associée à un risque majoré de perte de greffon à 5 ans post-biopsie.

D’autre part, l’étude nationale sur le réseau français DIVAT sur plus de 8000 transplantations rénales, à permis de construire un score de marginalité à partir de paramètres cliniques du donneur (dont l’âge). De manière importante, cette étude à aussi montré que l’âge du receveur interagit avec la marginalité du donneur. En d’autres termes, pour un même donneur, le risque d’échec est plus grand en cas de greffe chez un receveur vieux que chez un receveur jeune. Ce phénomène pourrait s’expliquer par une transmission de senescence receveur/donneur, ainsi que démontré chez la souris.  Actuellement, il n’existe pas de données sur la transmission de senescence biologique chez l’homme.

L’objectif de ce projet est d’étudier la transmission bidirectionnelle de sénescence entre receveur et greffon, et son impact sur le devenir de la transplantation. A l’aide de la biocollection DIVAT, 100 patients (50 cas/50 témoins) seront sélectionnés pour étudier la signature transcriptomique de senescence SenMayo au sein du tissu rénal et dans les cellules immunitaires circulantes à J0 et un an de greffe.

L’analyse de ces données permettra de conclure sur la transmission de senescence biologique chez l’homme, mais aussi sur ses répercussions tant chez le receveur que sur le greffon rénal. Ces résultats permettront à terme d’identifier des greffons et des receveurs éligibles aux traitements dits sénolytiques, capables de reverser la senescence cellulaire, actuellement en phase pré-clinique chez l’homme.